Premier millénaire : Forêts et marais profonds
Bien avant la naissance d’Haverskerque, c’est la grande forêt de Nieppe (du flamand n’iep = orme) appelée Le Wastelaut et connue dans notre région sous le nom de La Charbonnière, qui occupe le territoire de la Lys jusqu’à Aire-sur-la-Lys et Thérouanne.
Des marais profonds et inaccessibles empêchent longtemps les envahisseurs de pénétrer dans le pays.
C’est au IVe siècle que le défrichement du pays est amorcé. Du Ve au VIe siècle, les évêques évangélisent et fondent les premières églises et abbayes (abbaye de Saint Bertin au 6e, église de Saint Omer au 7e). C’est sous leur impulsion que les moines, aidés des premiers comtes de Flandre, entreprennent d’assécher et de défricher la région, méthodiquement. De 860 au début du 2e millénaire, comme Robert Le Frison le fit pour le château de la Motte au Bois, les comtes assèchent, défrichent et élèvent des mottes pour parer à l’attaque des envahisseurs mais aussi à l’invasion marine.
Il faut en effet rappeler ce que, 800 ans avant Baudouin Bras de Fer (862), Pline l’Ancien (1er siècle) écrit : « l’ « Océan » s’épanche sur les terres deux fois par jour et fera douter longtemps si les contrées sont bien de terre ferme ou une portion de mer ». D’importantes marées venaient en effet inonder les terres jusqu’à l’actuelle autoroute Dunkerque-Lille, d’altitude zéro. On comprend mieux que les Vikings aient remonté des estuaires bien plus que des rivières ! Au IXe siècle, ils suivent l’Escaut et son affluent, la Lys, sur leurs drakkars, et mettent tout à feu et à sang à tel point que Charles le Chauve visitant notre région en 865, ordonne de fortifier la rivière pour faire face à leurs incursions ; en 881, la forteresse de Saint-Venant résiste à leurs attaques tandis que Merville, Estaires et Aire sont détruites.
C’est de cette campagne inhospitalière qu’héritent les 1ers Comtes de Flandre (883) qui s’attèlent activement à l’assèchement et au défrichement tout en évitant que ce dernier fût abusif. En passant notons que le toponyme Le Sart = « essart » veut dire « résultat d’un nettoyage, d’un défrichement » comme Aire signifie « lieu bâti sur des marécages ».
On ne possède pas de renseignements sur l’histoire de la commune d’Haverskerque elle-même pendant la période qui précède l’an mil et les croisades. Il est permis toutefois de supposer qu’à cet endroit, existe déjà un sanctuaire chrétien aux murs de torchis et au toit de chaume, entouré de quelques masures au bord de la Lys, source de vie et moyen de communication — avec les voies romaines — à travers marécages et forêts.